Lumières noires, Le lac                         

Huile sur toile de lin

  • Lumières noires:Les mots, Les marches, Le Lac, Sillons et Lumières de verre: cliquez sur la flèche pour lire le texte de présentation


    Je peins la mémoire depuis 15 ans...

    Mémoire des lieux, que j’abordais déjà aux Beaux-arts (Série Résonance), puis mon travail sur les Clous et la longue série « Mémoire-peau ».

    Après avoir réalisé fin 2017 une série de grands formats réalistes, expressionnistes (Les épouvantails), qui traduisent la mémoire de notre temps, une nécessité absolue s’imposait alors. Une simplification.

    L’abandon du trait, de l’expression de la figure, de l’image. 

    Une certaine maturité me permettait alors de traduire non plus par la forme, mais par la matière pure, les sensations, les souvenirs, par les couleurs puis enfin par les noirs.

    Pour moi, peindre la mémoire aujourd’hui, est ce qui reste en moi de ce temps figuré, qui s’estompe et se transforme en simple impression, jusqu’à devenir sensation, abstraction. 


    Notre mémoire enregistre des instants particuliers, attachés à certains lieux, à certains parfums, le souvenir de personnes disparues…impalpables traces d’instants passés, furtifs, ou cicatrices indélébiles intimes.

    Malheureusement, notre mémoire ne garde pas définitivement ces émotions floues, instants secrets, tragiques ou heureux, ces moments précieux.

    Inéluctablement, ils s’estompent, se délitent, s’effacent et tendent à disparaître...


    Lumières noires et Lumières de verre :

    Il s’agit dans ce travail d’une traversée de territoires inexplorés de ma mémoire. Une exploration de ces ultimes traces essentielles. Ne laissant que souvenirs diffus et sensoriels, quand tout est épuré, quand tout s’est effacé.

    Lâcher prise. Retranscrire cette mémoire en abandonnant les repères traditionnels du ‘’figuratif’’, des formes, des carcans et des frontières.

    Ne plus utiliser la couleur, trop prégnante, façonnant exagérément le regardeur vers des sensations de couleurs purement esthétiques. 

    Les cadres disparaissent ainsi pour laisser place à l’essentiel. Ce que certains classent dans l’Abstraction ou le conceptuel.

    Éclosent alors dans ces multiples passages signifiants, ces lumières intimes, mes espaces rythmés, libres et purs. Scarifications codées du noir signifiant.


    Étrange sensation que le silence du noir...

    Tout participe clairement à de vraies perceptions. Brillance ou matité, lisse ou en relief, huile ou cire, toile de lin légère, panneau de bois dur et rigide, ou supports de verre. 

    Alchimie des différentes matières épaisses, agrégats des noirs d’os ou de fer, pigments broyés à l’huile sur la pierre, malaxés aux huiles cuites ou noires, aux essences entêtantes d’aspic, de térébenthine, ou de cire.


    Mais la matière ne peut plus alors être travaillée avec de simples pinceaux ou brosses. On ne peut plus peindre de la même manière. 

    Cette nouvelle évolution, cette remise en question, ce lâché prise oblige alors à tout ré inventer. 

    Créer ses propres outils (Grattoirs, racloirs, lame métallique, plexi taillé sur alu, brosses, etc.). En détourner d ‘autres ; Barre de seuil, raclette de carreleur, règles métalliques plates, …


    Je forme et enfouis alors mes strates de peinture inversées. Puis, tel un archéologue, en gratte les surfaces, explore, pour mettre à jour dans ces noirs profonds, ces instants passés, 

    et (re) découvrir mes souvenirs.

    Je fige, sculptant ce noir obscur et silencieux, un dédale de signes organisés, scarifications, traces, cicatrices, ou certaines sensations rythmées ou lentes, précises ou incertaines, non plus par la couleur mais par la matière ou son épaisseur.

    Dans ces SILLONS, la lumière fait apparaître, par des reflets changeants, mes souvenirs qui glissent alors dans ces stries formées, apparaissant ou disparaissant au gré de la lumière changeante.

    Dans ce LAC NOIR je navigue à travers ces labyrinthes complexes, codés, qui se noient dans l’étendue de matière noire de ma mémoire.

    Et dans LUMIERES DE VERRE, se fixent les circonvolutions, jonctions de neurones, sillons fragiles superposés. Ces vitraux profanes, doubles panneaux de verre, immobilisent ces traces, emprisonnant ces neurones sans couleur. Éclaboussés par la lumière aléatoire, dans la fausse transparence du verre, ils se trouvent révélés, mais enfermés dans la lourde obscurité de l’oubli.


    Je reste un peintre polymorphe, poursuivant mes recherches sur la mémoire, les cicatrices et la matière, perpétuant dans ce vaste champ des abstractions, les techniques anciennes pour donner une vraie pérennité à mon travail.

    La mémoire ne me joue-t-elle pas de sombres tours… essayant de refermer l’accès à mon (notre) histoire...

    Serge Tenèze,


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